Cohabitants: 40 ans de lutte contre le statut "rouge à lèvres"
En ce mercredi 8 mars 2023, journée internationale des droits des femmes, Solidaris rappelle combien il est urgent de supprimer le statut cohabitant qui accroît la précarité, porte atteinte aux droits fondamentaux et contribue à renforcer les inégalités de genre.
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- Publié le 08-03-2023 à 06h00
- Mis à jour le 08-03-2023 à 09h46
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Les mouvements féministes se mobilisent depuis 40 ans pour faire abolir le statut de cohabitant. "Quand il a été mis en place à la fin des années 70, on appelait ça le statut rouge à lèvres", précise Noémie Van Erps, secrétaire générale de Soralia (anciennement Femmes prévoyantes socialistes), mouvement d’éducation permanente de Solidaris qui milite pour les droits des femmes.
Le principe qui sous-tend le statut de cohabitant est que la personne bénéficiaire d’une allocation sociale vivant sous le même toit qu’une autre personne – un conjoint, un parent ou un colocataire – perçoit de facto un revenu moindre (que le taux isolé) au nom des économies d’échelle réalisées en partageant les frais.
Au fil du temps, le statut cohabitant a été étendu à d’autres régimes (revenu d’intégration sociale, Grapa, indemnités d’incapacité de travail…).
Un modèle d’un autre âge
Tous les citoyens sont concernés mais les femmes restent encore majoritaires dans la colonne des bénéficiaires du statut cohabitant, pour avoir par exemple renoncé à exercer une activité professionnelle à temps plein, cédant le statut de chef de ménage à leur conjoint, financièrement plus avantageux pour la famille.
Le recul de l’âge de la retraite accroît encore les inégalités hommes-femmes: en 2021, près de 273 000 femmes étaient en incapacité de longue durée pour 183 000 hommes.
Le statut de cohabitant est un modèle éminemment patriarcal, rappelle Noémie Van Erps "C’est un modèle où le chef de famille travaille, l’épouse est mère au foyer et dépendante financièrement. Le mari ouvre les droits sociaux dont vont bénéficier la femme et les enfants, considérés comme des personnes à charge. Cette vision tout à fait obsolète ne correspond plus à la réalité des ménages et des familles d’aujourd’hui".
Mécanisme d’appauvrissement
Tant du côté de Solidaris que des mouvements associatifs gravitant autour de la mutualité socialiste, on constate à quel point ce statut contribue à l’appauvrissement des personnes.
"Une personne qui gagne 2 000 € ne bénéficiera que d’une indemnité de 900 € pour une incapacité de travail de longue durée, soit 40% de son salaire", explique Sarah de Liamchine, présidente de Solidaris Wallonie et codirectrice de Présence et Action culturelles (PAC). Avec des revenus diminués de plus de la moitié, les fins de mois deviennent difficiles une fois que l’on a remboursé l’emprunt hypothécaire et payer les factures… Ces personnes doivent bien souvent solliciter l’aide du CPAS".
Dans le contexte actuel de crises successives qui renforce les inégalités sociales et la précarité, le statut de cohabitant fragilise encore un peu plus les publics précarisés dont font partie les femmes. "Le statut cohabitant est un déterminant non médical de la santé. Avec de faibles revenus, on est obligé de rogner sur le budget alimentation, de renoncer à des soins psychologiques ou dentaires…. Ce statut impacte directement la santé de nos affiliés".