En France, la rue en arbitre de la réforme des retraites
Les syndicats ont appelé à une nouvelle mobilisation générale, après que le projet de loi a été débattu dans le chaos à l’Assemblée Nationale.
Publié le 06-03-2023 à 16h45 - Mis à jour le 06-03-2023 à 16h46
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Une France "à l’arrêt". C’est par ces mots que les principaux syndicats ont appelé, le 24 février dernier, au blocage complet du pays, alors que le gouvernement tentait de faire passer aux forceps sa réforme des retraites, largement décriée par l’opposition mais jugée nécessaire par l’exécutif afin d’en sauver le financement sur le long terme.
Steak tartare
Sur le plan politique, les débats à l’Assemblée Nationale auront rarement été aussi chaotiques, entre une gauche (en particulier la France Insoumise), déterminée à torpiller le projet de loi à coups de milliers d’amendements, et un ministre du Travail, Olivier Dussopt (ancien socialiste, désormais représentant de l’aile gauche de la majorité présidentielle) qui joue son poste et une partie de son avenir politique.
Dans ce bras de fer où l’institutionnel le dispute à la pure communication, personne, avant ce mardi, n’a franchement gagné : les syndicats se sont désolidarisés des manœuvres de la gauche (NUPES), jugées contre-productives, si bien que lorsque le groupe parlementaire a fini par mettre un peu d’eau dans son vin, il était trop tard ; conformément à la Constitution française, le gouvernement a pu envoyer l’examen de la loi au Sénat sans en passer par un vote des députés.
Le ministre français, lui, a voulu renvoyer une image d’inflexibilité, allant jusqu’à décrire par le menu sa routine matinale: des séries de pompes suivies d’un steak tartare… tout en défendant, comme le gouvernement, l‘inévitabilité d’une telle réforme qui a pour objet principal le report de l’âge légal de la retraite de 62 à 64 ans.
"Il n’y aura pas de perdants. Dès lors qu’on sauve le système par répartition, tout le monde est gagnant", assurait encore le ministre ce lundi sur les ondes de France Info, tout s’enquérant de l’état du pays si son économie était mise "à genoux". Une partition que le gouvernement joue à l’unisson, en faisant bloc derrière son ministre.
"Ça s’active"
C’est donc la rue qui, ce 7 mars (et peut-être au-delà), devrait arbitrer le sort de la réforme. Selon les syndicats, ce mardi doit "être une véritable journée morte dans les entreprises, les administrations, les services, les commerces, les écoles, les lieux d’études, les transports..."
Alors que la première manifestation d’ampleur, fin janvier, avait mobilisé bien au-delà du million de personnes, le mouvement de grogne a un peu fluctué tout au long du mois de février, sans toutefois s’essouffler complètement après quatre journées et autant d’appels à la grève.
Ce coup-ci, les syndicats, rabibochés avec la gauche, espèrent clairement faire franchir un palier à la contestation, et comptent pour cela sur la profondeur et la diversité des corporations françaises, "dans les unions départementales, dans les fédérations, dans les syndicats tant au sein des entreprises que des services publics", espérait par exemple Force Ouvrière (FO) ce lundi, listant les grèves, débrayages et autres blocages prévus dans les transports, l’énergie, l’enseignement, jusqu’aux stations de ski et dans les théâtres. "Ça s’active. Ça s’active même beaucoup", prévenu le syndicat. Verdict ce mardi.