Réforme fiscale: "Un meilleur ciblage est nécessaire", estime Georges Gilkinet
Concernant la réforme fiscale, Georges Gilkinet plaide pour le "crédit d’impôt" qui aurait le mérite de ne pas laisser en plan les plus salaires les plus bas.
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Publié le 04-03-2023 à 04h00 - Mis à jour le 04-03-2023 à 08h42
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Globalement, le vice-premier ministre écolo, Georges Gilkinet, juge "plutôt positif" le projet de réforme fiscale présenté par son collègue aux Finances, Vincent Van Peteghem. "On y retrouve pas mal d’éléments qu’on avait mis sur la table", dit-il. Et en particulier le taux de TVA à 0% sur les fruits et légumes ou les transports en commun, auxquels il est sensible en tant que ministre de la Mobilité. "C’est le principe que les choix écologiques doivent être moins chers."
Dans la réforme, on prévoit une hausse des recettes de TVA, donc un impact sur le coût de la vie des ménages.
Dans ce qui est proposé, il y a un transfert, la TVA qui diminue sur certains biens et qui augmente un peu sur d’autres. C’est un jeu à somme positive. Ce à quoi on doit rester attentif, c’est que les biens de première nécessité restent accessibles financièrement et que tous les Belges aient la capacité de vivre dignement. Ce que je retiens surtout c’est que le projet prévoit une contribution plus importante des multinationales. Il s’appuie sur des travaux internationaux qui visent à faire en sorte qu’elles arrêtent de faire du shopping fiscal entre les États.
Une telle contribution ne peut pas s’appliquer au seul niveau belge.
C’est exact, il faut un accord européen, qui est en cours de finalisation. J’espère qu’il pourra aboutir, mais pour moi c’est normal que les multinationales paient leur contribution. On ne va par faire reposer la fiscalité uniquement sur les épaules des PME, des artisans, des sociétés qui sont ancrées en Belgique. Autre piste de financement sur la table, c’est la taxe sur les comptes-titres, qui fait contribuer ceux qui ont les moyens d’investir.
Ce doublement de la taxe sur les comptes-titres supérieurs à un million d’euros, le MR a déjà dit qu’il n’en voulait pas.
Le MR est contre beaucoup de choses. C’est le premier parti d’opposition ; il fonctionne par des tweets. Moi j’essaie de raisonner et de travailler sur base d’arguments. Le ministre des Finances a le courage de mettre sur la table une proposition qui me semble tout à fait raisonnable: ceux qui ont les épaules les plus larges contribuent pour permettre d’augmenter le revenu des travailleurs. C’est cela l’élément fondamental. On a un objectif majeur dans ce gouvernement, c’est d’augmenter le taux d’emploi et pour cela il faut rendre le travail plus intéressant d’un point de vue pécuniaire. Ceci dit, j’ai moi-même des choses à redire sur cette réforme qui n’est pas parfaite.
Sur quels éléments ?
Le principal élément d’amélioration de cette réforme, c’est la question du ciblage des avantages donnés aux travailleurs. Un meilleur ciblage est possible et nécessaire. Ça ne sert à rien d’accorder des avantages fiscaux aux plus hauts salaires de ce pays. Or c’est ce qui est proposé en utilisant la quotité exemptée d’impôt, qui offre un avantage fiscal à tout le monde.
Que proposez-vous ?
Il faut davantage cibler les salaires bas et moyens, parce que c’est là qu’on aura le levier incitant à aller travailler. C’est le principal élément à corriger. Si on veut un vrai levier pour la création d’emploi, il faut travailler par le crédit d’impôt, c’est notre proposition.
En quoi est-ce plus intéressant ?
Je pense aux mamans seules avec enfants qui aujourd’hui sont en dessous du revenu à partir duquel on paie de l’impôt et qui ne bénéficieront pas de la mesure proposée. Dans notre formule de crédit d’impôt, l’avantage pour les travailleurs aux salaires les plus bas peut aller jusque 300 € par mois. Ça fait une vraie différence pour ceux qui ont un salaire minimum. L’avantage est dégressif jusqu’au salaire médian mais on a une politique beaucoup plus juste. Et un système, qui plus est, qui ne se finance pas au détriment des entités fédérées, de la Région wallonne en l’occurrence. Le système proposé par le ministre des Finances diminue les recettes fiscales de l’État fédéral, donc la partie redistribuée vers les régions. Cela pourrait avoir un impact très élevé.
Sur le crédit d’impôt, vous pensez être soutenus ?
On n’est pas les seuls à défendre cette idée. Elle ne fait pas l’unanimité mais c’est quelque chose de discutable. Simplement parce que cette mesure coûte moins et est plus efficace, en fait. Le travail n’est pas fini ; on doit avancer, mais le projet va dans le sens des actes posés dans ce gouvernement qui prépare l’avenir. Sur toute mesure il faudra à la fin un accord des sept partis du gouvernement et jusqu’ici, malgré certains partenaires plus récalcitrants, on est très souvent parvenu à des accords. J’espère qu’on pourra aboutir avant la fin de la législature à une réforme fiscale qui va dans le sens d’un système plus juste.
Compléments de pension : "Ce n’est vraiment pas ce que les citoyens attendent de nous"
"Je suis choqué de découvrir que des montants de pension démesurés ont été payés à des mandataires politiques. Si on veut que la démocratie fonctionne, il faut mériter la confiance qui nous est donnée quand on est élu. Ce n’est vraiment pas cela que les citoyens attendent de nous", déplore Georges Gilkinet au regard des dernières "affaires". Le ministre se dit "frappé par la lecture des conclusions de l’enquête sur “un pays pour demain”", et en retient deux désirs exprimés: une structure de l’État plus simple, plus efficace et plus transparente, et "la confiance comme fondement d’une politique efficace". "C’est quoi les événements des dernières semaines ? Une corruption comme on en a jamais vu au Parlement européen, le cœur de la démocratie, l’endroit qui doit être le lieu du débat, avec des personnes respectables qui assument le rôle d’exemple qu’ils doivent incarner. Je suis choqué que des députés – sous réserve de l’enquête – se laissent corrompre par des pays étrangers. Heureusement qu’on a un système qui permet à un moment d’identifier ce genre de pratiques insupportables. Quelque part, ça me rassure, mais le meilleur antidote, c’est la transparence et la participation citoyenne. C’est la meilleure façon d’éviter le décrochage démocratique et l’entre-soi. C’est pour moi essentiel."
"Nous souhaitons, ajoute le ministre, que l’on demande l’avis des citoyens sur ce qu’ils souhaitent. C’en est fini des réformes institutionnelles dans un château, où les politiques parlent entre eux et où le mouton à cinq pattes qui est produit à l’issue de cette négociation compliquée est présenté au citoyen comme étant quelque chose à prendre où à laisser.
Le dossier qui fait "le plus mal au ventre" à Georges GilkinetDossier nucléaire : "Plutôt des énergies de paix"
Le report de la sortie du nucléaire par ce gouvernement, n’est-ce pas un gros caillou dans la chaussure des écologistes ?
Je ne le vois pas comme cela. Ce qui est un caillou dans la chaussure des Belges, c’est la situation dont on a hérité. Ce qui est un caillou dans la chaussure de tous les Européens, c’est notre dépendance énergétique à des importations de gaz, d’uranium. Par rapport à cela, on doit trouver des réponses. On n’a jamais travaillé aussi profondément en matière énergétique. Entre deux options, on a choisi celle de prolonger deux réacteurs pour dix ans et d’en fermer cinq.
Mais on demande déjà la prolongation, temporaire, de trois autres réacteurs.
Avant la sécurité de l’approvisionnement, il y a la sécurité. L’agence de contrôle nucléaire confirme que la meilleure solution, c’est de travailler uniquement avec les deux réacteurs les plus sûrs, même pour les deux hivers pour lesquels le problème se pose.
Ne vous êtes-vous quand même pas coupé de la base historique des écologistes ?
Les écologistes apprécient qu’on ait mis en place ce qui est nécessaire pour tourner le dos au nucléaire. On a montré notre capacité à agir de manière pragmatique et responsable. Et la question énergétique ne se résume pas au nucléaire. On n’a jamais développé autant les énergies renouvelables. Ce sont des énergies de paix, contrairement aux énergies pour lesquelles on se bat dans de nombreux pays. On a signé avant-hier le contrat pour la construction d’une île énergétique en mer du Nord qui permettra du stockage d’énergie. On a signé des accords au sujet de l’interconnexion en matière d’énergie renouvelable. On travaille évidemment sur la sécurité d’approvisionnement, mais en étant à l’avance. On n’a jamais autant investi en matière d’hydrogène. La situation dont on a hérité, c’était un hiver où on a dû prévoir du délestage, et aucun plan d’avenir. Le job qu’on s’est assigné, c’est de préparer l’avenir et d’accélérer la transition.
"Je rêve d’un truc : aller faire campagne en Flandre"
Alexander de Croo ? "On n’est pas toujours d’accord et on peut même se fâcher assez fortement, mais je trouve que, jusqu’ici, il a été attentif à permettre à chaque composante de ce gouvernement à sept de s’y retrouver dans les décisions qui sont prises. Il y a des avancées majeures qui ont pu être réalisées dans ce qu’il a qualifié de gouvernement le plus vert de l’histoire de la Belgique. Il a le mérite de tenir le cap dans un pays difficile à gérer, mais comme tous les pays. Sa force ? C’est quelqu’un qui aime foncièrement la Belgique comme un pays où cohabitent des germanophones, des francophones, des néerlandophones. C’est quelque chose que je partage vraiment avec lui, face aux forces qui veulent faire exploser la Belgique. Alexander partage cette même conviction. Il croit comme moi que ce pays en vaut la peine, confie Georges Gilkinet.
Il y a trop de partis qui jouent au punching-ball avec la Belgique. C’est notamment le cas en Flandre où certains ont dans leur programme la fin du pays, et moi je trouve que la Belgique, c’est quelque chose qui vaut la peine. On est vraiment une plus-value en Europe, quand on doit comprendre ce que l’autre veut, identifier des compromis possibles. Historiquement, nous les écologistes, on défend une circonscription fédérale unique. Je rêve d’un truc, c’est d’aller faire campagne en Flandre et d’avoir des responsables politiques flamands qui viennent chez nous. Comme ministre de la Mobilité, je m’occupe autant du train à Ostende que dans la gare d’Assesse."