Faut-il craindre une pandémie de grippe aviaire chez l’homme ?
Le décès d’une petite Cambodgienne ravive la peur de la grippe aviaire. Le risque de pandémie chez l’homme est faible mais les adaptations potentielles du virus H5N1 invitent à la plus grande vigilance.
Publié le 23-02-2023 à 19h13 - Mis à jour le 23-02-2023 à 19h33
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Depuis fin 2021, l’Europe est aux prises avec la plus importante épidémie de grippe aviaire. Et depuis peu, le virus H5N1, hautement infectieux, contamine également des mammifères. Des renards, furets, visons, loutres et même un chat ont été testés positifs. Début février, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) appelait à la vigilance face au risque de transmission du H5N1 à des mammifères.
Chez les humains, les contaminations sont rares: 868 cas recensés par l’OMS au cours des vingt dernières années pour 457 décès. Dernière victime en date: une petite Cambodgienne de 11 ans décédée mercredi dernier des suites de la grippe aviaire. Les personnes positives au H5N1 ont été en contact étroit avec des oiseaux infectés. On signale toutefois de très rares cas de transmission entre êtres humains.
Un risque à ne pas perdre de vue
Faut-il craindre une transmission interhumaine du virus H5N1 qui ouvrirait la porte à une pandémie de grippe aviaire ? "Comme il n’y a pas de transmission entre humains, le risque de pandémie est faible mais c’est un risque qu’il ne faut pas perdre de vue, estime l’infectiologue Yves Lathem. Pour le moment, le virus n’a pas montré qu’il s’était adapté à la transmission aux humains mais on a de plus en plus de signes montrant qu’il s’adapte à d’autres mammifères qui nous entourent. Le fait qu’il s’adapte à des récepteurs plus proches des nôtres que ceux de la volaille fait suspecter qu’il puisse arriver à un moment donné à une transmission interhumaine efficace. Cela demande d’être doublement attentif".
Une attention dont les autorités sanitaires belges n’ont guère fait preuve jusqu’il y a peu, note l’infectiologue. "Lorsque l’on a vu réapparaître la grippe aviaire un peu partout fin 2021, je me suis étonné que l’on ne s’inquiète pas plus des risques liés au H5N1 alors que la flambée de cas de Covid était dernière nous. Ce H5N1 avait pourtant suscité énormément de craintes en 2004-2005".
Fin janvier, un Risk Assessment Group Veterinary Emerging Zoonoses (RAG-V-EZ) a été mis sur pied notamment pour étudier la possibilité d’une transmission de la grippe aviaire aux humains.
Bien plus dangereux que le Covid
Si le virus de la grippe aviaire venait à s’acclimater à l’homme, il y aurait des dégâts beaucoup plus importants que ceux engendrés par le Covid, prévient Yves Van Lathem. "Avec le Covid-19, le taux de mortalité dans la population en général était de 2%, ici on est autour de 40% voire 50% et ce virus H5N1 ne tue pas que des petits vieux ou des immunodéprimés. En Égypte et en Asie du Sud-Est, ce sont pour la plupart des enfants et des jeunes qui s’occupaient de volaille qui en sont morts".
Outre les traitements habituels contre les symptômes (fièvre, toux,..), on recourt aux antiviraux pour soigner la grippe aviaire. Le vaccin contre la grippe saisonnière n’étant pas efficace contre cette pathologie, des vaccins inactivés anti-H5N1 (le fragment infectieux qu’ils contiennent a été rendu inoffensif) ont été mis au point, notamment par la firme GSK, et homologués dans plusieurs pays mais ils ne sont pas encore largement distribués. Certains pays ont constitué des stocks dans le cadre d’une éventuelle pandémie bien que l’on ignore dans quelle mesure ces vaccins préviennent l’infection à H5N1 ou atténuent la gravité de la maladie. Actuellement, l’OMS n’a pas de politique concernant leur utilisation.