"Lorsque la guerre en Ukraine a éclaté, l’envie d’aider a primé sur le reste", témoignages de bénévoles wallons
Après l’éclatement du conflit entre la Russie et l'Ukraine, les bénévoles et coordinateurs locaux wallons ont apporté un soutien précieux aux réfugiés arrivés en Belgique. Témoignage.
Publié le 22-02-2023 à 07h00 - Mis à jour le 22-02-2023 à 13h38
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"L orsque la guerre a éclaté il y a un an, j’étais évidemment très inquiète et je le suis toujours. Car j’ai de la famille dans plusieurs villes d’Ukraine." C’est peu dire que la vie de Maria Buzan, 26 ans, a connu un véritable tournant l’année passée. L’Orp-Jauchoise travaillait alors dans une entreprise privée, bien loin de l’accueil des réfugiés. "Je travaillais pour une entreprise qui commercialise des piscines...", sourit-elle.
En février dernier, face à l’atrocité du conflit, Maria et sa maman décident de se mobiliser et de collecter des dons à destination de l’Ukraine. Née en Belgique, Maria est elle-même d’origine ukrainienne. "Une grande partie de ma famille vit à Novovolynsk, une ville proche de la frontière polonaise. J’y ai encore ma grand-mère, mes cousins et cousines. Dans ma famille, je suis d’ailleurs la seule à être née en Belgique!"
Cette première collecte de dons s’est faite naturellement, parce que les besoins sur place étaient criants, et parce que Maria et sa maman ressentaient la nécessité de se mobiliser.
Au même moment, la Région wallonne octroie d’importants moyens (lire ci-contre) aux communes chargées d’organiser l’accueil des réfugiés. Orp-Jauche recherche alors activement une coordinatrice de l’accueil des ressortissants ukrainiens. "La directrice de la Commune d’Orp-Jauche m’a demandé si je connaissais quelqu’un qui parlait ukrainien pour faire ce travail."
En réalité, Maria a le profil idéal pour assurer ce rôle. Polyglotte, elle parle couramment le français, l’ukrainien, le russe, le polonais et a une très bonne connaissance de l’anglais. "J’avais un emploi… mais l’envie d’aider était plus forte." En mars 2022, la jeune femme décide de quitter son job et endosse, pour un an, le rôle de coordinatrice locale.
Un rôle de médiatrice
En tant que coordinatrice, Maria a pour mission d’aider et de soutenir les réfugiés ukrainiens. Engagée par Orp-Jauche, elle travaille également pour d’autres communes de l’est du Brabant wallon (Ramillies, Hélécine, Perwez, Jodoigne). Dès l’arrivée des Ukrainiens, la jeune femme les encadre dans leurs démarches : auprès de la Commune, du CPAS, des banques et mutuelles. "Au départ, je ne connaissais pas tous ces aspects administratifs et juridiques. Avant de se présenter à la mutuelle par exemple, il faut rassembler certains documents, avoir réalisé certaines étapes au préalable. Ça, je l’ai appris petit à petit sur le terrain..."
Maria joue aussi un rôle d’intermédiaire entre les réfugiés et les familles d’accueil. Elle assure également la traduction, lorsque l’anglais ne peut pas servir de langue commune aux hébergeurs et hébergés. "L’une de mes fonctions était aussi de rencontrer chaque famille d’accueil. On faisait signer une convention d’hébergement entre les deux parties, pour que tout se passe bien. Il y a quelques mois, sur une journée, je pouvais rencontrer jusqu’à 7-8 familles!"
La jeune femme s’est donnée à fond dans ce travail. En un an, elle a aidé environ 250 réfugiés à réaliser leurs démarches en Belgique, et les a aussi très souvent accompagnés au quotidien. "J’ai dépassé mes 38 heures par semaine, c’est certain!, rit-elle. J’ai un mari et des enfants. Mon mari me disait souvent qu’il était fatigué de m’entendre constamment parler ukrainien au téléphone."
L’Orp-Jauchoise était joignable à tout moment, tant par les familles que par les Ukrainiens. Avec quelques anecdotes cocasses à la clé : "J’ai déjà reçu un appel de parents affolés, à 3 h du matin, parce qu’ils cherchaient désespérément leur fils. Ne parlant pas français, c’était compliqué pour eux de joindre la police. Le garçon en question était simplement resté chez un copain après avoir fait la fête..."
Un nouveau défi
Avec une quinzaine de familles d’accueil par commune en plus des réfugiés ukrainiens, Maria a été une intermédiaire et médiatrice de choix, au plus fort de la crise. Son contrat arrive cependant à échéance. D’ici une petite semaine, elle ne sera plus coordinatrice. "Au début de la crise, c’était assez difficile d’être toute seule, de devoir être partout à la fois, de tout gérer. Aujourd’hui, c’est différent. Les arrivées sont nettement moins nombreuses en Belgique, et les Ukrainiens qui sont dans les communes dont je m’occupe ont appris à se débrouiller ", dit-elle.
Si elle a parfois été déçue de l’attitude de certains réfugiés, "qui n’étaient malheureusement pas très reconnaissants", Maria retient surtout le formidable élan de solidarité des Belges. "Je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant de dons, autant d’hébergeurs. C’était impressionnant !"
L’aventure n’a clairement pas été de tout repos. Mais pas de quoi entamer la motivation de Maria, qui envisage même de poursuivre l’expérience. "J’aimerais continuer à travailler avec les Ukrainiens. Peut-être de manière un peu plus calme, avec un peu moins de terrain. Mais je pense que mon aide peut encore être utile..."