Le policier chargé de la protection des VIP sanctionné pour avoir causé un accident avec délit de fuite obtient gain de cause
Un policier belge chargé de la protection d’un ambassadeur a eu une retenue sur salaire après un accrochage. Sauf que personne n’a ressenti le moindre choc. Sanctionné, l’homme a obtenu gain de cause devant le Conseil d’Etat. La retenue sur salaire a été annulée.
Publié le 20-02-2023 à 13h31 - Mis à jour le 20-02-2023 à 15h40
:focal(507x341:517x331)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/FJB53U5XERBV7GN77X7UK6NLNU.jpg)
Il exerce cette fonction de protection de personnel VIP depuis 13 ans, sans jamais avoir fait l’objet du moindre rapport négatif. Jusqu’en 2020 où l’on reproche à cet inspecteur de la direction de la Protection de la police fédérale (DAP) d’avoir causé un accident avec délit de fuite. C’était le 13 mars 2020. Ce jour-là, il assurait, avec deux autres collègues, la protection d’un ambassadeur et était chargé de conduire la voiture de service. Lors d’une marche-arrière, il aurait percuté un véhicule stationné sur la voie publique, avant de quitter les lieux. Sans constat. Ni lui ni ses collègues n’ont ressenti le moindre choc. Ce sont des images de caméra de surveillance, transmises par l’ambassade, qui ont mis le feu aux poudres, occasionnant l’ouverture d’une enquête interne.
"Jamais nous n’aurions pris la fuite sans avertir cette autre personne"
"Je pense qu’avec le système de ralentisseur à cet endroit, ainsi que la vitesse réduite lors de notre marche arrière, nous n’avons ni entendu ni ressenti le moindre choc", a indiqué le policier incriminé. "Je ne vois pas d’autre explication, sinon que ce soit moi, mais aussi mes deux collègues, nous serions sortis du véhicule et fait le nécessaire afin d’avertir le propriétaire de l’autre voiture, en laissant nos coordonnées. Et jamais nous n’aurions pris la fuite sans avertir cette autre personne." Les autres collègues présents dans le véhicule ont déclaré n’avoir « ressenti aucun choc, ni entendu le dispositif de recul déclencher (bip de recul) ».
Sur base de la vidéo, où il n’y a aucun doute sur l’accrochage, le directeur de la DAP a saisi l’autorité disciplinaire supérieure. Ce qu'on reproche au policier? "Avoir porté atteinte à la dignité de sa fonction et manqué à ses obligations professionnelles en ayant occasionné, au volant d’un véhicule de service et à l’occasion d’une mission de protection VIP un accident de la circulation engendrant des dommages à un véhicule appartenant à un tiers ; négligé de suivre la procédure prévue au sein de son unité en cas d’accident de roulage avec un véhicule de service; négligé de respecter la notion d’exemple qui doit animer chaque membre de la police intégrée."
Retenue de traitement de 5% durant un mois
En 2021, le chauffeur incriminé s’est vu infliger une sanction disciplinaire lourde : une retenue de traitement de cinq pourcents pendant un mois. L’inspecteur n’est pas d’accord et a introduit une requête en reconsidération auprès du conseil de discipline. Lequel a néanmoins estimé que les faits reprochés ne sont pas établis à suffisance, sauf en ce qui concerne le comportement du policier ayant consisté à avoir occasionné, au volant d’un véhicule de service et à l’occasion d’une mission de protection VIP un accident de la circulation engendrant des dommages à un véhicule appartenant à un tiers. Le conseil de discipline a proposé qu'un avertissement soit prononcé. Mais l’autorité disciplinaire supérieure en a décidé autrement, infligeant la sanction disciplinaire de la retenue de traitement de 5% durant un mois.
Le policier a donc saisi le Conseil d’Etat, et a enfin obtenu gain de cause, annulant la retenue sur salaire. Il contestait avoir eu conscience de provoquer cet accident et s’être consciemment abstenu de suivre les procédures applicables en pareille situation. Il précisait ne pas pouvoir "admettre d’être sanctionné pour avoir omis de suivre les procédures applicables en matière d’accident de la circulation" et pour "avoir manqué à son devoir d’exemplarité (...)".
Les seules images de vidéosurveillance ne permettent pas d'établir que le policier aurait été conscient de l’accident litigieux
« L’absence de matérialité d’un de ces griefs (…) suffit pour entraîner l’annulation de l’acte attaqué », a indiqué le Conseil d’Etat, dans son arrêt. Oui, il y a eu un accident, mais encore fallait-il que l’agent soit bien conscient qu’il ait occasionné l’accrochage. Or, ici, l’autorité s’est uniquement fondée sur les seules images de vidéosurveillance pour considérer qu’il est "peu probable" que l’avertisseur ne se soit pas déclenché et que le policier incriminé et ses collègues ne se soient pas rendu compte du choc. Et qu’enfin, et surtout, aucun dégât n’a été constaté sur le véhicule de service. "Cette absence totale de dégâts au véhicule manœuvré par le requérant paraît accréditer la thèse d’un choc léger dont ni celui-ci, ni les autres occupants, n’ont pu se rendre compte." Les seules images de vidéosurveillance ne permettent donc pas de tenir pour établi que le policier aurait été conscient de l’accident litigieux et qu’il devait, partant, respecter les consignes et procédures subséquentes en avertissant les autorités et la police locale. Il existait à tout le moins un doute à ce propos. La sanction disciplinaire a donc été annulée.