Marc Tarabella face aux questions de la justice
L’eurodéputé belge a perdu l’immunité que lui conférait son mandat. Soupçonné de corruption, il se dit innocent.
Publié le 02-02-2023 à 16h08 - Mis à jour le 03-02-2023 à 09h06
Le pas lourd, les épaules voûtées, Marc Tarabella s’est présenté aux journalistes qui l’attendaient au sortir de l’hémicycle du Parlement européen à Bruxelles. "Je suis innocent dans cette affaire, et maintenant il appartient à la justice de m’interroger", a déclaré le bourgmestre d’Anthisnes après avoir lui-même voté pour la levée de son imminité. Un geste qui vise à dissiper les soupçons de corruptions qui pèsent sur lui et son collègue socialiste, l’italien Andrea Cozzolino, dont l’immunité a également été levée ce jeudi.
Si Tarabella s’est tu jusqu’à aujourd’hui, c’est, dit-il "par respect pour la procédure (...) en attendant d’être appelé par les enquêteurs, le juge d’instruction, ce qui a mon avis va être fait maintenant puisque mon immunité est levée."
Lourds soupçons
C’est à main levée que le Parlement à avalisé cette levée d’immunité, laquelle protégeait, jusqu’ici, Marc Tarabella des retombées de l’affaire du Qatargate, qui secoue le Parlement européen depuis fin 2022.
C’est aussi la première fois qu’une procédure d’urgence de levée d’immunité, lancée courant janvier, va aussi vite. Mardi, la Commission des affaires juridiques du Parlement avait recommandé, à l’unanimité, la levée de l’immunité de l’eurodéputé belge, "considérant que, d’après l’enquête actuellement en cours, Marc Tarabella pourrait être impliqué dans des actes de corruption liés à l’ingérence d’un ou plusieurs États étrangers en vue d’influencer les débats et décisions prises au sein du Parlement européen."
Le rapport rappelle ce dont est soupçonné M. Tarabella qui, "au cours des deux dernières années, est soupçonné d’avoir appuyé certaines positions au sein du Parlement européen en faveur d’un État tiers (NDLR : a priori le Qatar) en échange de récompenses en argent liquide."
Témoignage accablant
Sans le citer, le rapport évoque surtout le témoignage de Pier Antonio Panzeri, l’ancien eurodéputé italien soupçonné d’être au centre de l’organisation qui a permis au Qatar (et sans doute au Maroc), de corrompre des parlementaires européens, dont la vice-présidente du Parlement Eva Kaili, passée aux aveux et écrouée depuis, tout comme son compagnon Francesco Giorgi.
Le témoignage de Panzeri est clairement un motif de levée de l’immunité, souligne le rapport, puisque selon les enquêteurs belges, Marc Tarabella "aurait été récompensé à plusieurs reprises pour un montant global estimé de 120 000 à140 000 euros."
Faible réponse politique
La rapporteure du rapport, la députée (LFI) Manon Aubry, s’est réjouie que la justice puisse faire son travail suite à ces levées d’immunité, mais regrette la faiblesse de la réponse politique . "Les propositions ambitieuses de la résolution initiée à ma demande et adoptée le 15 décembre 2022 ont été piétinées", juge-t-elle, fustigeant au passage le plan d’action de la Présidente du Parlement Roberta Metsola, qui "ne reprend ainsi que quatre des quinze mesures adoptées à la quasi-unanimité par le Parlement européen un mois plus tôt" (lire ci-contre). Bref, le Qatargate n’a pas fini de faire des vagues...