À Kherson et ailleurs, l’absence douloureuse des enfants ukrainiens déportés
L’Ukraine compterait près de 15 000 enfants déportés en zones d’occupation russe.
Publié le 31-01-2023 à 20h00
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Selon les derniers chiffres communiqués par les autorités ukrainiennes, près de 15 000 enfants ukrainiens auraient été déportés en territoire occupé par la Russie depuis le début de la guerre, sans que l’on puisse chiffrer avec exactitude ce qui s’apparente à des rapts, en particulier dans des zones qui ont été récemment libérées par l’armée ukrainienne.
Début octobre 2022, peu avant l’assaut ukrainien dans la région de Kherson, l’administration de la ville, alors sous occupation russe, avait ainsi décrété une période de "vacances" pour les enfants jusqu’au 21 de ce même mois, s’enquérant de "l’augmentation de bombardements". La destination proposée ? La Crimée, où "les enfants, pendant la période de vacances, participeront aux programmes de santé de la Fédération de Russie", expliquait dans un communiqué officiel le ministère de l’Éducation et des Sciences de la région sous contrôle russe.
Pris en otage
Vraisemblablement, ces enfants ne sont majoritairement pas revenus de Crimée, comme l’a rapporté le Guardian fin décembre, plus de deux mois après la reprise de la ville par les Ukrainiens. "Je ne sais pas qui va s’occuper de toi maintenant, mais tu ne retournes pas à Kherson, c’est à 100% [certain]… Tu peux remercier ta mère pour ça" a déclaré le directeur d’un de ces camps à un adolescent enlevé en octobre dernier, et qui est parvenu à transmettre les enregistrements à sa mère, restée à Kherson. Celle-ci explique avoir envoyé son enfant en Crimée non par sympathie pro russe, mais en pensant sincèrement que ce dernier, comme nombre de ses camarades de classe, y profiterait de vacances gratuites au bord de la mer.
Comme elle, des parents ont envoyé leurs enfants, parfois seulement âgés de 6 ans, dans des camps "de vacances" russes. Parfois, relate le Guardian, les parents ont été invités à venir chercher leur enfant eux-mêmes, ce qui est bien sûr impossible. En octobre, l’agence de presse Tass, affiliée à la Russie, estimait que 4 500 enfants de Kherson et Zaporijjia se trouvaient alors en Crimée.
Rééducation
Cette semaine, un nouveau cran dans l’horreur semble avoir été franchi, après qu’un média russe indépendant, (Vertska) a découvert la présence d’orphelins ukrainiens en bas âge (moins de 5 ans) dans un camp de Crimée réputé pour sa propension à la maltraitance. "Vertska a pu confirmer qu’au moins 14 orphelins de Kherson ont été transportés à l’orphelinat ‘Yolochka’de Simferopol ", écrit la publication, affirmant avoir découvert où se trouvaient les enfants à partir des photos publiées sur un site d’adoption dans la région de Moscou. Du côté de l’orphelinat où ont transité les enfants en Crimée, le "programme de travail" fait froid dans le dos : " l’institution devrait éduquer les enfants avec des ‘sentiments moraux plus élevés’y compris ‘le patriotisme et la citoyenneté’. Il s’agit, précise le programme, de" former chez les élèves l’idée que ‘la Crimée est dans le sud de la Russie’", afin que ces derniers aient" ‘la conscience d’eux-mêmes en tant que citoyen de la Russie multinationale’".
La Russie viole les " principes fondamentaux de la protection de l’enfance ", a dénoncé, alors qu’il revenait d’Ukraine fin janvier, le chef de l’agence des Nations unies pour les réfugiés Filipo Grandi auprès de l’agence Reuters, estimant que " leur donner la nationalité (russe) ou les faire adopter va à l’encontre des principes fondamentaux de la protection de l’enfance dans les situations de guerre ". Le président ukrainien Zelensky lui a demandé d’en faire plus pour sortir les enfants ukrainiens de zones occupées par les Russes.