Faiblesse musculaire, problèmes psychologiques et troubles cognitifs : comment prévenir le syndrome post soins intensifs ?
Faiblesse musculaire, problèmes psychologiques et troubles cognitifs. Les soins intensifs sauvent des vies mais laissent des séquelles. Témoignage d’Anne-Marie.
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Publié le 27-01-2023 à 06h30
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En mars 2020, Anne-Marie, 74 ans, se rend au CHU de Liège pour suspicion de Covid-19, avec une saturation en oxygène très basse.
Elle reste six heures dans la salle d’examen, puis est finalement gardée en soins intensifs pendant quinze jours, dont une semaine intubée et plongée dans un coma artificiel.
"On m’a sortie des soins intensifs pour m’amener en revalidation, où je suis encore restée dix jours. Les brancardiers m’ont dit: “On va essayer de se lever. Moi, naïvement, je réponds oui. Impossible de lever mon postérieur ! C’était comme si j’étais vissée sur le brancard. Deux infirmiers m’ont dit de mettre mes bras autour de leur cou, je me suis soulevée de 10 cm, puis je suis retombée tout de suite."
Anne-Marie a perdu 8 kg de masse musculaire. "Et je n’ai pas récupéré à 100%, malgré les dix jours de revalidations, puis les 120 séances de kiné. Je garde une faiblesse, je marche beaucoup plus lentement, et je dois m’aider avec une canne ou un déambulateur, pour avoir plus de stabilité."
Elle garde aussi une grande fatigue. Mais pas de problèmes cognitifs. "Pourtant, en sortant des soins intensifs, j’étais déphasée. Quand j’ai vu la date du 4 avril au mur, j’ai dit: “Ce n’est pas possible, mon anniversaire est le 31 mars, et on ne l’a pas fêté !” Les infirmiers m’ont rassurée, mais je ne les croyais qu’à moitié. Et le soir, j’ai veillé jusqu’à minuit, pour voir si la date changeait sur l’horloge. J’avais perdu mes repères", se souvient-elle.
Syndrome post-soins intensifs: les symptômes
Le KCE sort aujourd’hui une étude portant sur la prévention du syndrome post-soins intensifs (PICS), qui se manifeste chez jusqu’à 4% des patients. Les symptômes jouent sur plusieurs tableaux: faiblesse musculaire, problèmes psychologiques et troubles cognitifs.
D’autres dysfonctionnements observés chez les survivants des soins intensifs ont été rattachés au PICS, comme par des troubles métaboliques (diabète), des perturbations endocriniennes (altération de la production de cortisol ou des hormones hypophysaires), des troubles du sommeil, une fatigue extrême ou des douleurs chroniques.
Comment éviter le PICS ?
Selon le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE), cinq grands principes peuvent mener à des améliorations de la survie.
Le 1er est la gestion de la douleur, qui est ressentie par la plupart des patients en soins intensifs, même s’ils sont inconscients. Car la douleur est un puissant facteur de risque de développer des symptômes de stress post-traumatique.
Ensuite, il est conseillé de diminuer la durée de la ventilation mécanique autant que possible. Cela va de pair avec le maintien d’une sédation aussi légère que possible. Il faut donc tenter régulièrement de réveiller le patient et favoriser sa respiration spontanée dès que ses capacités respiratoires le permettent.
Il faut également prévenir le delirium. Cet état de confusion fréquent chez les patients en soins intensifs est un gros facteur de stress post-traumatique. Pour l’éviter, il faut maintenir le patient en contact avec la réalité, en gardant des cycles jour-nuit (favoriser la lumière du jour), en lui donnant une qualité du sommeil (lumières tamisées la nuit, boules pour réduire le bruit), en améliorant son confort et en favorisant des interactions régulières avec les proches.
Enfin, il est important de mobiliser le patient dès que possible, pour maintenir sa force musculaire et de ses capacités fonctionnelles. Cela va de la mobilisation passive dans le lit, aux exercices avec un pédalier de lit et même à la marche au sein du service dès que l’état clinique le permet.
Recommandations
Le KCE recommande d’impliquer les proches, de favoriser les visites, en élargissant les horaires. Il recommande également un renforcement du personnel, car les mesures préconisées nécessitent davantage d’infirmiers et de kinésithérapeutes.