Babylon [CRITIQUE] - Le cauchemar de la fabrique à rêves
Les débuts de Hollywood, un monde flamboyant où la passion fait décoller avant de consumer.
Publié le 17-01-2023 à 17h25 - Mis à jour le 17-01-2023 à 17h26
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Au milieu du désert de Los Angeles, un jeune Mexicain se démène pour acheminer un éléphant vers une immense demeure. Il a intérêt à mener la bête à bon port, car elle fait partie du clou de la soirée donnée par un producteur de cinéma très en vue en ce début des années 20.
Une poignée d’heures plus tard, c’est l’explosion. La villa est envahie par une horde de fêtards aux nez poudrés et coupettes remplies. Danses sauvages, cris bestiaux, sexe torride, tout est permis. C’est même conseillé si on veut se faire remarquer.
Ça, Nellie LaRoy l’a bien pigé. Elle ne rêve que d’une chose: devenir la prochaine coqueluche de Hollywood. Et bingo, elle tape dans l’œil du producteur. Même pas le temps d’avaler un café pour faire passer l’haleine alcoolisée, on l’attend dès le lendemain matin sur le plateau de la dernière grosse production du bonhomme.
Damien Chazelle ( La La Land, Whiplash) nous convie à un raz-de-marée. Il nous sert un film à donner le tournis. Tourbillonnant, coloré, décomplexé mais aussi dense et réfléchi, Babylon retrace l’âge d’or de Hollywood, à travers le destin de plusieurs personnages. Cette jeune actrice, l’assistant mexicain, un acteur vieillissant, tous vont prendre part à l’aventure. Celle des débuts du cinéma, cette industrie du rêve qui fait battre le cœur de passionnés mais peut à chaque instant les réduire en miettes.
Passion, dépravation et sueur
Car si le film s’ouvre avec un déferlement de luxure, il dépeint aussi ces tournages cocasses, où on bricole et assemble. Il raconte le désarroi des acteurs du muet face à l’arrivée du parlant. Montre l’ascension fulgurante et la déchéance encore plus rapide.
À une époque où le 7e art vit des instants difficiles, Damien Chazelle nous refait son histoire, sur un ton désenchanté. Mais on sent son amour pour ce monde qui réinvente le réel.
Sa démarche n’est pas novatrice, on pense à Gatsby le magnifique, qui partage cette flamboyance et ces soirées démesurées, à Once upon a time in Hollywood et la façon dont il revisite la vie des studios de Los Angeles, ou encore à The Artist. Mais on est happés par ces destins entrecroisés.
Même si c’est parfois trop long (plus de 3 heures), Babylon est une merveille de mise en scène. Un spectacle qui parle d’un monde révolu mais aux consonances actuelles. Et qui peut se revoir, pour en saisir toutes les références cachées.
Drame de Damien Chazelle. Avec Margot Robbie, Brad Pitt et Diego Calva. Durée: 3 h 09.