La psychiatrie aura elle aussi ses unités de soins intensifs
Une dizaine d’unités High Intensive Care (HIC) vont être ouvertes en Wallonie pour offrir aux personnes atteintes d’une pathologie mentale en situation de crise une prise en charge plus humaine, plus respectueuse.
Publié le 12-01-2023 à 19h00
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Début avril, le centre spécialisé Notre-Dame des Anges, basé à Liège, ouvrira une unité High Intensive Care (HIC). Dix-huit autres centres ou hôpitaux du pays suivront pour un total de 28 unités HIC.
"C’est une belle avancée, tant pour les patients que pour les soignants qui auront le sentiment de faire un travail de meilleure qualité, plus respectueux de l’humanité des patients", se réjouit le Dr Éric Constant, directeur médical au centre spécialisé Notre-Dame des Anges.
Prise en charge intensifiée et multidisciplinaire
Pour les personnes atteintes d’une pathologie mentale lourde, les HIC sont un peu l’équivalent des soins intensifs dans les hôpitaux généraux, résume le psychiatre. "Comme cela existe pour les pathologies somatiques, il y a une prise en charge intensifiée. Dans les 24 heures qui suivent l’admission dans une unité HIC, il faut qu’il y ait une concertation avec les acteurs habituels: le médecin traitant, le psychologue ou psychiatre traitant, la famille, l’assistant social, l’administrateur de biens, le médiateur… Cette concertation permettra de fixer les objectifs de l’hospitalisation, les étapes de la prise en charge…".
Une telle prise en charge implique un renforcement des effectifs, presque un ETP par patient. Psychologues, ergothérapeutes, kinés, éducateurs, assistants sociaux,… l’encadrement sera multidisciplinaire. "Plus on intensifie la prise en charge sociale, psychologique, occupationnelle… des patients aigus dès leur admission, moins longue sera l’hospitalisation", avance le Dr Constant qui est aussi professeur invité à l’ULiège et à l’UCLouvain.
Le monitoring HIC prévoit également le recours à des pairs aidants (personnes ayant connu le même parcours participant souvent à des groupes de parole) ou encore la possibilité pour le patient hospitalisé d’être accompagné par un proche.
Troubles sévères
Tous les patients fortement déstabilisés ne vont pas nécessairement intégrer une unité HIC. "Cela dépend du degré de sévérité du trouble, du degré de dangerosité de la personne pour elle-même ou pour les autres. C’est le même principe que celui qui prévaut dans un hôpital général: le patient qui entre pour une hypertension artérielle ne sera pas orienté vers les soins intensifs comme cela se fera pour la personne qui a un infarctus du myocarde".
Le HIC n’est pas un service d’urgence, la plupart des patients seront envoyés par le médecin traitant ou un service d’urgence. Les patients y resteront pour une période de 3 semaines, renouvelable deux fois. "Et ces prolongations doivent être justifiées", souligne le Dr Éric Constant. Le patient pourra ensuite être orienté vers un autre service, une unité psychiatrique par exemple.
En studio thérapeutique plutôt qu’en chambre d’isolement
La philosophie qui sous-tend les unités HIC est de tout mettre en œuvre pour éviter l’isolement des patients en crise (chambre d’isolement ou contention). Ces unités mettront à la disposition des patients davantage de chambres individuelles ainsi que des studios thérapeutiques, structure intermédiaire entre une chambre normale et l’isolement.
"Pour un patient très suicidaire, se retrouver dans une chambre d’isolement peut être traumatique, explique le psychiatre. S’il est placé dans une chambre normale, aménagée pour qu’il ne puisse pas se blesser, équipée de caméras pour le surveiller… cela permet une prise en charge de meilleure qualité et plus respectueuse de la personne ".
Quel financement ?
Le budget des soins de santé n’étant pas extensible, c’est via le gel de lits que seront financées les unités HIC, mécanisme déjà utilisé lors de la création des équipes mobiles en santé mentale.
Au centre spécialisé Notre-Dame des Anges, ce seront pas moins de 17 lits qui seront fermés. "On demande aux hôpitaux psychiatriques de fermer des lits pour transférer le personnel qui y était attaché dans les unités HIC. C’est dommage car nous aurons moins de disponibilités qu’à l’heure actuelle mais c’est le prix à payer pour aller vers des soins de meilleure qualité", conclut le directeur médical de l’institution.