Les chauves-souris, amies des vaches ?
Natagora mène une étude pour déterminer dans quelle mesure les chauves-souris réduisent les maladies et le stress dans les étables.
Publié le 05-01-2023 à 06h00 - Mis à jour le 05-01-2023 à 11h41
La présence de chauve-souris dans les étables peut-elle améliorer le rendement en viande et en lait chez les bovins ? C’est l’hypothèse a priori saugrenue que cherche à vérifier une étude de Natagora, plus particulièrement de son pôle Plecotus dédié aux chiroptères.
L’été prochain sera consacré à un troisième tour d’enregistrements et de relevés de terrain dans plusieurs fermes wallonnes. Mais l’association environnementale lance dès à présent un appel pour recruter un étudiant qui rédige un travail de fin d’étude dans les domaines des sciences, biologie, agronomie, environnement ou équivalent. C’est lui qui sera chargé d’analyser les données de terrain.
S’il faudra le quantifier, Frédéric Forget ne doute guère de l’effet bénéfique de la présence de chauves-souris dans les étables. Le médecin libramontois, qui coordonne le groupe de travail Plecotus, a pu constater lors des collectes de données les deux étés précédents que les chauves-souris présentes dans les étables dévorent bel et bien les mouches. Celles posées la nuit sur les plafonds ou celles posées sur les bovins et qui s’envolent quand ceux-ci s’ébrouent.
"Or dans les étables il y a des mouches piqueuses qui peuvent transmettre des maladies par le sang et des mouches lécheuses qui en transmettent par la peau", note le docteur Forget.
Moins de mouches, moins de maladies
En réduisant le nombre d’insectes présents dans les étables à bovins, les chauves-souris minimisent donc le risque de transmission de maladies. Par ailleurs, ces maladies ainsi que le stress que peuvent provoquer les mouches chez les bovins peuvent aussi avoir un effet sur la quantité de lait produite et sur la qualité de la viande.
Pour mesurer l’effet préventif des chauves-souris, les bénévoles de Natagora munis d’enregistreurs ultrasons ont dénombré les petits animaux volants dans les étables. Certains ont été capturés pour collecter des excréments qui permettront, par analyse ADN, de vérifier dans quelle proportion les mouches font partie du menu des demoiselles nocturnes. L’opération qui sera renouvelée l’été prochain a déjà permis d’identifier 8 espèces différentes de chauves-souris dans les étables.
Elle devra aussi permettre de déterminer les paramètres qui favorisent la présence de la chauve-souris. Que ce soit au sein de l’étable ou dans l’environnement immédiat de la ferme.
Les résultats de ces recherches, qui bénéficient d’un subside de la Région wallonne, seront soumis à la relecture d’un comité scientifique d’ici fin 2023. On saura alors dans quelle mesure les chauves-souris sont les amies des vaches.
Un effet positif déjà vérifié sur les cultures de maïs
S’il reste à démontrer dans les étables, l’effet bénéfique des interactions des chauves-souris sur les cultures de maïs a été vérifié scientifiquement dès 2014.
Aux États-Unis, des études comparatives entre des parcelles de maïs où chassaient des chauves-souris et d’autres, protégées par un filet durant la nuit, ont notamment montré qu’il y avait 59 % de larves d’insectes en plus par épi là où les chauves-souris ne pouvaient pas chasser. Avec un effet net sur le rendement : 56 % d’épis endommagés en plus dans les parcelles où le petit prédateur était exclu.
Par ailleurs, en exerçant cette pression de prédation sur les insectes ravageurs des cultures, les chauves-souris ont aussi permis de réduire les maladies fongiques dont certains insectes sont des vecteurs. Cette étude réalisée par l’Université de Stanford a été publiée en 2015 par l’Académie nationale des sciences des États-Unis.