Éric Lartigau (« Cet été-là »): « La famille, je la filme depuis toujours »
Le réalisateur de " La famille Bélier " signe un nouveau long-métrage, adapté d’un roman graphique canadien, venu nous parler de l’enfance et du délicat passage jusqu’à l’adolescence. On en a discuté avec lui.
Publié le 03-01-2023 à 12h00
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C’est son "thème de cinéma", celui qu’il décline inlassablement, passant de la comédie au drame avec bonheur. Rien de surprenant, donc, à ce que la famille soit à nouveau au cœur de Cet été-là, le nouveau film d’Éric Lartigau.
"Les familles, je les filme depuis toujours, analyse le réalisateur de… La famille Bélier, son grand succès de 2014. Et c’est un puits sans fond. Après, il ne s’agit pas de reproduire sa propre vie à l’identique, mais d’observer les comportements des enfants, des parents, et de voir comment chacun fait pour avancer, grandir, transmettre, avec des bagages parfois un peu plus lourds. De capter, aussi, les moments un peu suspendus qui les traversent toutes."
De charrier de vieux souvenirs, aussi. Ceux d’Éric Lartigau sont remontés à la surface à la lecture de Cet été-là, le roman graphique dont son film est l’adaptation. Un ouvrage publié chez nous aux éditions Rue de Sèvres et que l’on doit aux Canadiennes d’origine asiatique Jillian et Mariko Tanaki. Les deux cousines y racontaient un été un peu particulier vécu par deux grandes copines de 9 et 11 au bord du Lac Awago.
Touché par la délicatesse du propos, Éric Lartigau en a transposé l’action dans les Landes, le cadre de sa propre enfance: "C’est la région de naissance de mon père. La maison familiale se trouvait à Soorts-Hossegor. Une vieille ferme du XVIe siècle, entourée des maisons des parents, oncles, cousins. L’été, c’étaient de grosses fêtes, où l’on était cent à table, dans le jardin, avec la famille, donc avec tout ce que ça représente de joies, comme de déchirures", se souvient le quinquagénaire (58 ans).
Dans son film, Dune et Mathilde ont donc remplacé Rose et Windy. Mais dans le fond, et parce que c’est un sujet universel, les fillettes y vivent la même chose: un énième été en bord d’océan et dans les effluves de pins, mais un été différent, parce que Dune a maintenant 11 ans, un corps qui change, des sentiments qui naissent et des parents… qui se font la gueule.
Bref, ça grenouille sévère, et vient nous rappeler que l’enfance, ce n’est pas toujours rose bonbon, mais aussi imprégné de pas mal de noirceur: "Ce sont des moments qu’heureusement on oublie, estime le cinéaste français. Mais c’est ça aussi, un enfant: un être foisonnant, qui passe d’une émotion à une autre en un millième de seconde, qui peut rire et pleurer dans la même phrase, parce qu’il est tourmenté, et à l’affût de tout, à commencer par le comportement des adultes. Et notamment de parents qui peuvent, parfois, se montrer terriblement malhabiles et le blesser en un mot, une phrase, une réflexion, dont lui se souviendra toute sa vie. "
Vécue à hauteur de môme, cette tranche de vie qui parle autant de mort que d’amour, voit aussi ses petites protagonistes aborder, à leur façon, la question du sexe. Souvent sans comprendre de quoi il retourne exactement. Et en fantasmant, dans le cas de Mathilde, au sujet d’un grand ado du coin: "C’est son héros, même s’il n’y a, bien sûr, aucune ambiguïté. Et on a tous eu, enfants, nos héros, des hommes et des femmes qui nous impressionnnaient, dont on était quelque part amoureux. Et qui nous ont contribué à nous élever. "
« Cet été-là », comédie dramatique d’Éric Lartigau. Avec Marina Fois. Sortie le 4/1.