Atouts et faiblesses de Lula pour son troisième mandat
Le héros de la gauche brésilienne rempile pour un troisième mandat et promet de réunifier le Brésil. Mais pourra-t-il le faire face à un Congrès et un Sénat a priori hostiles ?
Publié le 02-01-2023 à 16h19 - Mis à jour le 02-01-2023 à 16h20
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Et de trois; ce dimanche, Luiz Ignacio Lula Da Silva a été investi président du Brésil pour un troisième mandat. Devant une foule compacte à Brasilia, il était entouré de celles et ceux qui font la diversité de son pays: enseignant, travailleur ou représentant des peuples indigènes, il ne manquait en fait qu’une personne pour que la transition soit complète ; l’ancien président Jair Bolsonaro, qui a préféré s’envoler aux États-Unis plutôt que d’avoir à transmettre (symboliquement) ce pouvoir qui lui a échappé au soir d’un second tour plus serré que prévu.
Paquet de la destruction
Ému aux larmes, ce dimanche, Lula a promis de réunifier un peuple plus déchiré que jamais. "Je vais gouverner pour 215 millions de Brésiliens, et pas seulement ceux qui ont voté pour moi", a promis le président qui entend transformer l’économie brésilienne tout en œuvrant en faveur de l’environnement. Un fameux double défi, alors qu’environ trente millions de Brésiliens souffrent de la faim et que le nouveau président doit gouverner avec un congrès dominé par les partis de droite, dont le Parti Libéral (PL) de Bolsonaro, qui a également progressé au Sénat.
Sur le plan environnemental, la tâche s’annonce ardue. Bien avant de quitter le pouvoir, les élus bolsonaristes avaient mis sur la table législative un "paquet de la destruction", comme l’ont surnommé les associations écologistes brésiliennes, soit une série de projets de lois nocifs pour l’environnement. On parle, entre autres, d’autorisations pour de nouveaux pesticides, de l’occupation accrue des terres publiques, l’exploitation minière des terres autochtones ou encore du code forestier, susceptible d’être assoupli.
Une vieille connaissance
Alors que Lula a fait de la défense de l’environnement, et singulièrement de l’Amazonie, une priorité et un axe de refonte de l’économie brésilienne, il lui fallait une personnalité d’exception pour occuper le poste de ministre de l’environnement. Le président brésilien a choisi une vieille connaissance: l’expérimentée Marina Silva, 64 ans, qui fut sénatrice de l’Amazonie mais qui a, surtout, déjà occupé ce poste lors du premier mandat de Lula, de 2003 à 2008.
Férocement opposée aux projets de la puissante agro-industrie brésilienne, cette afro descendante était parvenue à ralentir sensiblement la déforestation de l’Amazonie, livrant une guerre sans merci aux entreprises ne respectant pas les permis environnementaux.
Mais la meilleure arme de Lula pour démanteler le "paquet de la destruction" des bolsonaristes pourrait bien être la société civile. Alors qu’il était attendu que le Sénat brésilien, partiellement renouvelé à l’issue du scrutin, avalise le versant "pesticides" du paquet, il n’en a finalement rien été, le projet n’ayant pas été discuté lors de la dernière session législative de l’année suite à une forte pression de plusieurs ONG, dont Greenpeace Brésil.
Clientélisme
Autre arme dont pourrait certainement bénéficier Lula dans les années à venir, c’est ce que l’on appelle au Brésil le " fisiologismo ", qui désigne le clientélisme d’un certain nombre de partis, plutôt au centre de l’échiquier politique, à l’idéologie"flottante", et donc susceptibles de se vendre au pouvoir en place en échange de faveurs, peu importe sa couleur politique.
Toutefois, alors que le PL de Bolsonaro domine à la fois le Congrès et le Sénat, les négociations s’annoncent serrées en ce qui concerne les grands chantiers envisagés par l’ancien ouvrier métallurgiste. Pour l’heure, Lula a surtout révoqué les décrets bolsonaristes qui entravaient la lutte contre la délinquance environnementale et ordonné au ministère de l’Environnement et du Changement climatique de soumettre, dans les 45 jours, une proposition de nouvelle réglementation.