Les crédits défaillants repartent à la hausse
Les ouvertures de crédit comme le nombre de crédits défaillants sont en augmentation en Belgique. La faute à la crise de l’inflation ?
Publié le 19-12-2022 à 16h51
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Le nombre de nouvelles ouvertures de crédit de même que le taux de crédits défaillants, principalement à la consommation, sont repartis à la hausse. Cette situation interpellante est pointée par l’ASBL Financité dans son dernier rapport sur l’inclusion financière, publié ce lundi.
Les chiffres sont éloquents : alors que le nombre de nouvelles ouvertures de crédit n’avait cessé de baisser ces dernières années, passant de 538 038 en 2013 à 161 111 en 2020 (- 70%), la tendance s’est visiblement inversée. En 2021, la hausse est indéniable, avec 177 990 nouveaux crédits contractés. Et il ne s’agirait pas d’une erreur de parcours puisqu’au 31 août 2022, 134 744 nouveaux crédits avaient déjà été enregistrés, soit 16,4% de plus qu’à la même période en 2021.
"Il est difficile d’avancer une explication, mais on pourrait évidemment faire le lien avec la situation actuelle, estime Anne Fily, chargée de recherche en inclusion financière au sein de Financité. Certaines personnes avaient déjà du mal à faire face aux dépenses du quotidien avant la crise de l’inflation. D’autres n’ont pas ou plus d’épargne. Les données de la Banque nationale montrent que la capacité des gens à mettre de l’argent de côté s’est écroulée.Vu le contexte, ce recours au crédit n’est pas étonnant."
Cette augmentation des ouvertures de crédit est confirmée par Febelfin. Pour la fédération belge du secteur financier, prudente, aucune explication univoque ne s’impose cependant. "Il faut d’ailleurs noter que l’octroi d’une ouverture de crédit ne veut pas nécessairement dire qu’elle sera fortement utilisée. Elle peut également être prise comme moyen complémentaire “ au cas où ”".
« Des crédits de trésorerie »
Les défaillances de crédits s’inscrivent aussi dans cette tendance à la hausse. Il faut toutefois être nuancé : en 2021, le nombre total de crédits défaillants était en diminution pour la cinquième année consécutive.
En revanche, les données attestent bien d’une hausse de 9,5% des nouveaux crédits défaillants par rapport à la même période l’an passé, soit entre octobre 2021 et octobre 2022. "Ce sont les crédits à la consommation qui sont particulièrement touchés", souligne Financité, dans son rapport. Le montant moyen des arriérés par contrat défaillant, tous crédits confondus, était de 5 398€ fin 2021, contre 5 407€ en octobre 2022. "Aujourd’hui, ce qui est très clair, c’est qu’on est vraiment dans des crédits de trésorerie", affirme Anne Fily.
N’y aurait-il pas également un effet de rattrapage post-Covid ? C’est en tout cas la raison avancée par Elisa Dehon, économiste à l’Observatoire du crédit et de l’endettement. "Cette hausse des nouveaux crédits défaillants, je l’expliquerais plutôt par le fait qu’en 2020 et 2021, plusieurs mesures ont été mises en place pour soutenir les particuliers, notamment les reports de paiement pour les crédits hypothécaires et les crédits à la consommation. Selon moi, c’est pour cela qu’on assiste à une hausse de la défaillance aujourd’hui, et moins en raison de la crise de l’inflation et des problèmes financiers qui en découlent. Il y a, à mon sens, un effet de rattrapage qui s’opère aujourd’hui, suite à la crise sanitaire."
Pas trop d’inquiétude
Alors que deux tiers de la population majeure a au moins un crédit en cours en Belgique, faut-il s’attendre à une nouvelle détérioration de la situation en 2023 ? "Tant que l’inflation reste à des niveaux aussi élevés, pour les ménages qui n’ont pas d’épargne et des revenus modestes, cela sera toujours très compliqué...", relève Anne Fily.
Sur base des chiffres actuels, Febelfin comme l’Observatoire du crédit et de l’endettement demeurent malgré tout confiants. "Il y a peut-être un lien à faire avec la crise de l’inflation et les prix de l’énergie, mais pour l’instant, nous n’avons pas vraiment de données à avancer à ce sujet-là, détaille Elisa Dehon . Pour l’heure, cette hausse des nouveaux crédits défaillants et des ouvertures de crédits s’apparenterait plutôt à un effet de rattrapage. Donc je ne suis pas trop inquiète..."