Changer la loi pour sauver des compatriotes prisonniers en Iran
Un projet de loi ouvrant la voie au « transfèrement de personnes condamnées », notamment de Belgique vers l’Iran fait débat, alors que l’on apprend qu’un belge est incarcéré sans motif à Téhéran depuis des mois.
Publié le 05-07-2022 à 20h27 - Mis à jour le 13-01-2023 à 17h36
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Aux dires du ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD), le projet de loi qui a atterri ce mardi sur la table de la commission des relations extérieures (avant un vote au parlement ce jeudi) n’est lié à "aucun dossierpersonnel" . Le projet en question concerne des traités qui lient la Belgique à l’Inde et aux Émirats arabes unis en termes d’entraide judiciaire en matière pénale, mais surtout à l’Iran, cette fois en matière de "transfèrement de personnes condamnées" . Autrement dit, à de possibles échanges - tacites - entre ressortissants iraniens condamnés et emprisonnés en Belgique et ressortissants belges condamnés ou détenus en Iran.
Un terroriste dans l’équation
On voit mal comment cette question pourrait ne pas être liée à des "dossiers personnels" et très actuels : en février 2021, un diplomate iranien, Asadollah Asadi, a été condamné à vingt ans de prison pour avoir fomenté un attentat contre la résistanceiranienne réfugiée en France. Évité de justesse en 2018, l’attentat visait un rassemblement du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) à Villepinte, près de Paris. Trois autres personnes, de nationalité belgo-iraniennes, ont par ailleurs été lourdement condamnées dans ce dossier (condamnations confirmées, voire aggravées, en appel). Fait troublant : à l’époque, ledit diplomate n’avait, lui, pas fait appel.
«Otages»
L’Iran a eu beau crier au complot (tout en condamnant la violence et le terrorisme), puis appeler officiellement (en mai dernier) à la libération du diplomate, il ne pouvait y avoir aucune faveur de la part du gouvernement belge (la loi ne le permettant pas), surtout quand on sait que le rassemblement visé à Paris réunissait des milliers de gens, y compris des personnalités politiques françaises et étrangères.
Depuis lors, l’Iran utilise manifestement tous les moyens à sa disposition pour faire libérer son diplomate. À commencer par agiter la menace d’une exécution du professeur de la VUB (de nationalité suédo-iranienne) Ahmedreza Djalali, jugé pour espionnage et condamné à mort en 2017.
Au total, une douzaine d’Européens (pour la plupart binationaux) sont détenus dans les prisons iraniennes, souvent pour des suspicions d’espionnage, mais parfois, sans même qu’il y ait de charges exactes à leur encontre. C’est le cas du travailleur humanitaire belge Olivier Vandecasteele, incarcéré à Téhéran depuis la nuit du 24 au 25 février dernier. Une "capture" demeurée secrète (à la demande de la famille) jusqu’à ces dernières 48 heures, le SPF Affaires étrangères ayant jusqu’ici œuvré dans l’ombre pour obtenir sa libération - en vain.
Concordance des dossiers
Vu ces éléments, il est troublant que la sortie dans la presse (dont l’ Avenir ) des proches de Monsieur Vandecasteele intervienne alors que le projet de loi est sur le point d’être soumis au vote des parlementaires. Ce qui n’a pas manqué de mettre les parlementaires de la commission dans l’embarras, la plupart ne pouvant ignorer cette situation au moment de la tenue du débat. Un fameux dilemme.