Le roi Philippe au Congoa prononcé un discours résolument tourné vers l’avenir
Le roi Philippe s’est exprimé à Kinshasa lors d’un discours au parfum historique. Plaidant pour un futur apaisé, il a réitéré ses « profonds regrets » sur la « blessure » que fut la colonisation.
- Publié le 08-06-2022 à 20h38
- Mis à jour le 08-06-2022 à 20h57
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À la tribune hissée sur l’esplanade du palais du peuple à Kinshasa, qui regroupe le Sénat et l’Assemblée nationale congolaise, c’est un discours au parfum historique qu’a prononcé ce mercredi le roi Philippe, au cours de la première mission diplomatique belge là-bas depuis douze ans. Comme il y a deux ans, le roi a formulé de vive voix des regrets sincères, cette fois devant des Congolais en chair en os massés derrière des barrières de sécurité et agitant des drapeaux belges ou aux couleurs du parti du président congolais Félix Tshisekedi.
Sans aucune ambiguïté, Philippe a estimé devant la foule que " le régime colonial comme tel était basé sur l’exploitation et la domination ", que ce " régime était celui d’une relation inégale, en soi injustifiable, marqué par le paternalisme, les discriminations et le racisme " et qu’il " a donné lieu à des exactions et des humiliations. "
" À l’occasion de mon premier voyage au Congo, ici même, face au peuple congolais et à ceux qui aujourd’hui encore en souffrent, je désire réaffirmer mes plus profonds regrets pour ces blessures du passé ", a poursuivi le roi, reprenant les mêmes mots que dans sa lettre adressée au Président congolais il y a de cela deux ans.
Inquiétudes
Toutefois, même s’il s’agissait là de la partie la plus attendue du discours, cela n’en constituait pas la plus grande partie. Le roi, au diapason de l’exécutif, s’est également inquiété, à juste titre, de la situation sécuritaire d’un pays esseulé par deux ans de pandémie et dont l’économie d’est fortement dégradée ces dernières années.
" Aujourd’hui, l’instabilité à l’Est du pays où règnent trop souvent une violence inhumaine et l’impunité, demeure une grande source d’inquiétude pour nous tous. Cette situation ne peut plus durer. Il en va de notre responsabilité à tous d’y remédier ", a ainsi averti le roi, alors que fin mai, plus de 70000 personnes étaient déplacées au Nord-Kivu dans un contexte de tensions galopantes avec le voisin rwandais. Devant une telle situation, le roi – comme avant lui le Premier ministre – a assuré le pays du " soutien de la Belgique, au sein des instances internationales, à toute initiative visant à la stabilité et au développement harmonieux de l’Afrique des Grands Lacs. La reprise progressive de notre coopération militaire s’inscrit dans la même logique ".
Quant à l’intérieur des frontières, le roi a plaidé pour " un surcroît tellement nécessaire de bonne gouvernance, de prospérité, de santé, de sécurité et de justice ", réaffirmant le " soutien ferme à la stabilisation et la démocratisation du pays ainsi qu’au respect des droits humains ".
Espoirs
Au-delà de ces inquiétudes et espoirs, le roi a surtout insisté sur les points de convergence des deux pays. Alors que la journée avait démarré par une cérémonie commémorative à la mémoire des combattants congolais de 39-45 – l’un d’eux, le caporal Kuyunku, dernier survivant de cette période, fut d’ailleurs décoré par le roi en personne -, Philippe a rappelé que " les deux peuples ont su tisser, grâce à une affinité toute particulière, des liens interpersonnels riches et variés ", citant par exemple la découverte du virus Ebola par le virologue congolais Jean-Jacques Muyembe et le docteur belge Peter Piot, ou encore la jeunesse belgo-congolaise, laquelle contribue " intensément à la vie sociale, économique et culturelle de la Belgique ", a souligné Philippe en témoignant à ces jeunes sa reconnaissance.
L’espoir était également de mise lorsque Philippe a énuméré les énormes atouts dont dispose le pays et sa population, mais dont elle ne bénéficie pas, ou trop peu, actuellement. Ainsi de sa " biodiversité exceptionnelle "; de ses "forêts primaires, si importantes pour la captation du CO2"; des " ressources de votre sous-sol " ou d’" un immense complexe fluvial capable d’alimenter ce qui pourrait devenir le plus grand réseau hydroélectrique du monde et ainsi permettre la production d’énergie propre pour toute la région ".
En résumé, c’était bien le futur du Congo – et avec lui ses relations avec la Belgique – qui sous-tendait ce discours royal au final assez peu tourné vers le passé (lire également ci-contre). "Aujourd’hui, les bases d’un nouveau partenariat bilatéral sont posées" , a plaidé le roi, soulignant que le pays restait le premier partenaire de la Belgique en Afrique.