Meurtre d’Anita Lekeu à Wanze: les avocats de Terry Hoyoux ont plaidé pour une peine de 20 ans de prison
Alors que le ministère public a requis une peine de 27 ans, les avocats de Terry Hoyoux ont plaidé pour les circonstances atténuantes et une peine de 20 ans de prison devant les assises de Namur.
- Publié le 16-02-2023 à 13h05
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Me Maxime Dulieu a rappelé aux jurés qu’avant de juger, il fallait comprendre. Même s’il ne s’agit aucunement, dans son chef ou celui de son collègue, Me Colin Gilissen «d’adoucir les faits, qui sont horribles, innommables et irréparables. Monsieur Hoyoux en est pleinement conscient et assumera. Il vous dit la vérité, même quand il vous dit qu’il ne se souvient pas. S’il peut parfois paraître taciturne, c’est parce qu’il s’est enfermé derrière un mur de la honte: par rapport à sa famille, d’avoir ôté la vie à quelqu’un, d’avoir déçu sa maman. »
Il a ensuite insisté sur le fait qu’il n’y avait pas de lien causal entre le vol et le meurtre. La cour d’assises de Liège l’a dit, la Cour de cassation l’a confirmé. « Terry Hoyoux n’a pas tué Anita Lekeu pour faciliter le vol. C’est définitif, on ne peut pas revenir dessus même si ça ne plait pas à certaines parties. » Pour lui, Terry Hoyoux a voulu stopper le flot de reproches que lui a fait Anita Lekeu. « Il veut la faire taire. Sûrement, qu’il appuie sur son visage à un moment. Les marques de strangulation au lien, elles, sont dues à la chaîne » que la victime portait autour du cou. « Monsieur ne saurait pas non plus avoir inventé qu’il avait les maisons ankylosées quand il arrête de l’étrangler. Tout ça corrobore sa version. »
La rage puis la panique puis l’égarement
Et après la rage, la peur. Et la honte. « En panique, avec l’éventualité que la victime se réveille, il se dit qu’il ne faut pas que sa famille sache ce qu’il a fait. C’est là qu’il descend chercher un couteau. La panique fait ensuite place à l’égarement : il marche en chaussettes dans une flaque de sang et divague dans l’habitation, abandonne le gant de toilette avec son ADN dans l’évier et, le comble, replace le couteau ensanglanté dans le présentoir! Contrairement à ce qui a été dit, il n’a clairement jamais tenté de maquiller quoi que ce soit! »
Et puis lui revient en tête la présence de son comparse à l’extérieur. « Sortir et lui dire qu’on avorte le plan? Grégory Baudin aurait alors eu des doutes, se serait dit qu’il s’était passé quelque chose. Il faut donc continuer le plan initial, en paraissant le plus normal possible. »
« Ne tenez pas compte d’une éventuelle libération conditionnelle »
Me Dulieu est ensuite revenu pour les jurés sur l’éventuelle libération conditionnelle évoquée par l’avocat général dans son réquisitoire. « Non, il ne sera pas d’office libéré au tiers de sa peine, ni même aux deux-tiers. La notion de libération conditionnelle, elle ne vous appartient de toute façon pas mais au tribunal d’application des peines qui ne l’accorde que quand il est sûr, après avoir étudié scrupuleusement le plan de réinsertion qui ne sera pas simple ici avec le risque de récidive. Et puis, qui vous dit qu’entretemps, la loi sur la libération conditionnelle ne sera pas modifiée en ce qui concerne les crimes de sang? Ce projet-là est sur la table actuellement, on ne sait même pas si la libération conditionnelle existera encore » au moment où Terry Hoyoux pourra la demander.
Pour Me Colin Gilissen, « je crois qu’on a fait une erreur fondamentale, un oubli, en ne vous lisant pas l’arrêt de la cour d’assises de Liège. On vous demande de juger de faits en vous désincarnant d’une partie du dossier. C’est un dossier très technique, en plus. Vous avez été amputés d’une partie des débats, c’est la réalité. Le précédent procès a duré 9 jours, trois fois plus. Vous auriez vu des experts que vous n’avez pas vus, aussi. Vous auriez eu la plaidoirie de la partie civile, les répliques de tous les intervenants... » Le conseil de Terry Hoyoux a ensuite lu plusieurs extraits de l’arrêt de la cour d’assises liégeoise. Les réponses auxquelles le précédent jury a dû répondre et qui ne seront pas soumises à l’actuel.
« Il est ce qu’il est mais c’est surtout un écorché vif, un mutilé des sentiments»
« Oui, monsieur Hoyoux a donné sa vérité. Il manque peut-être des choses mais il ne se contredit jamais. Il raconte aussi des choses qui ne sont pas à son avantage et dont vous n’auriez jamais rien su s’il n’en avait pas parlé, comme quand il explique être remonté pour arracher le collier du cou de madame Lekeu déjà décédée. Quand il se promène dans la maison avec des chaussettes, en quoi tente-t-il de maquiller quoi que ce soit? Et des aveux, c’est comme un accouchement, ça se prépare et c’est difficile. Mais il les a faits et les a renouvelés en audition, devant la cour d’assises de Liège et devant vous. Et il faut au moins les écouter pour se faire une opinion. »
Il a ensuite brossé un long et complet portrait de l’accusé. Des carences affectives de son enfance entre autres qui le mènent à consommer des stupéfiants pour «anesthésier » tout ça et à commettre des vols. Qui expliquent également les relations qu’il a avec les autres, ou qu’il n’a surtout pas, et qu’il construit de loin, qui font qu’il noue surtout avec « des mauvaises fréquentations ». « Mon client, il est ce qu’il est mais c’est surtout un écorché vif, un mutilé des sentiments qu’il n’a jamais pu verbaliser et explorer. »
Des aveux, son âge, sa vie, sa personnalité, ses remords
Pour punir les faits « gravissimes et sordides » reprochés à Terry Hoyoux, Me Colin Gilissen a néanmoins plaidé des circonstances atténuantes. « On va vous plaider le maximum dans ce cas, c’est-à-dire 20 ans. Et comme circonstances atténuantes? Les aveux de monsieur Hoyoux qui n’a jamais été pris en défaut de mensonge, son jeune âge ou son immaturité, son parcours de vie ainsi que sa personnalité même s’il était aussi généreux et investi. Il y a aussi la problématique du casier judiciaire. Au moment où nous plaidions à Liège, il n’en avait pas. Juridiquement, on pourrait plaider le fait qu’il n’en avait pas au moment des faits mais il en a un maintenant et ce serait de la mauvaise foi de notre part de vous demander de retenir cette circonstance atténuante. Par contre, vous pourrez tenir compte de ses remords et de ses regrets. Nous trouverions profondément injuste que parce qu’il y eu un problème juridique, monsieur soit condamné aujourd’hui davantage qu’il y a quelques mois. »